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Le Nouvelliste

VIH/SIDA: la pauvreté tue en Haïti malgré la prise des médicaments

Aug. 26, 2020, midnight

Les spécialistes Aaron Richterman, Fernet Léandre, J Grégory Jerôme, Alexander C Tsai, Louise C Ivers travaillant dans le domaine des maladies infectieuses et de la santé globale aux États-Unis et en Haïti avec « Zanmi Lasante » se sont penchés sur les facteurs qui influencent la mortalité à long terme des PVVIH en milieu rural en Haïti malgré la prise des médicaments.  L'apparition des ARVs dans la lutte visant la suppression de la charge virale des PVVIH en Haïti a permis de réduire de façon spectaculaire le taux de mortalité due au VIH. À bien regarder, cette baisse de mortalité entraînée par les ARVs a été rattrapée, dans les zones rurales en Haïti, par la pauvreté, le faible niveau de vie et autres tares de la vie quotidienne. Dans les pays à faible revenu, le VIH reste malgré l'accès aux traitements antirétroviraux, la neuvième cause de décès dans les pays à faible revenu. 464 personnes vivant avec le VIH ont terminé l'enquête. Elles viennent des Centres de santé de Petite-Rivière de l'Artibonite, de  St-Marc (203) et de Verrettes (93). À la fin de l'enquête, 296 personnes sont suivies activement, 118 sont décédées, d'autres sont perdues de vue ou transférées à une autre clinique. « Avec plus de 10% de perte globale au suivi, le quart des participants est mort sur un temps de suivi médian de près de 6 ans. Il convient de conclure que le suivi clinique régulier et la fourniture d'ARVs sont insuffisants pour empêcher les mauvais résultats dans les établissements appauvris », lit-on dans cet article publié le 11 août 2020 dans le « Open Forum Infectious Diseases of Oxford University Press ». « En utilisant des modèles de régression multivariables, nous avons constaté que la pauvreté, l'état matrimonial unique, l'âge le plus jeune, la faible qualité de vie et le nombre de CD4 de base plus bas étaient associés indépendamment à la mortalité », poursuit cette étude. Plus loin, il ressort que les progrès qui ont été enregistrés, à court terme, en vue d'une baisse de la mortalité due au VIH avec la prise d'ARVs risquent d'être rattrapés des années après par la pauvreté. Cela est d'autant plus vrai en milieu rural.  « Nous avons également trouvé une variation significative de la mortalité selon l'emplacement. Les Haïtiens ruraux font face à un appauvrissement généralisé et des infrastructures publiques limitées, et cette étude a eu lieu durant une période particulièrement difficile en Haïti, peu de temps après un tremblement de terre dévastateur et au milieu d'une grande épidémie de choléra. Les centres de santé de cette étude avaient donné la priorité à l’accès au traitement antirétroviral pendant plus d’une décennie au moment de cette étude et fournissent une aide économique dans le cadre des soins de routine aux personnes vivant avec le VIH (par exemple, bons de transport, frais de scolarité pour les enfants des patients). Malgré ces mesures, les difficultés économiques et l'insécurité alimentaire étaient omniprésentes dans cette communauté. Nous avons donc constaté que la pauvreté relative au sein de notre population d'étude rurale restait un puissant prédicteur de décès indépendamment de l'état immunologique et d'autres facteurs démographiques, cliniques et sociaux », révèlent les chercheurs qui ont suivi un groupe de PVVIH durant une décennie à partir 2010. Partant de ces considérations, les chercheurs pensent que « les programmes de protection sociale et de réduction de la pauvreté, en particulier ceux ciblant les ménages connaissant les pires niveaux de privation, peuvent être des éléments importants de la réduction de la mortalité des personnes séropositives sous ARVs». Rappelant que « le financement de la protection sociale en Haïti par l'Onu-Sida et le Plan d'urgence du président pour la lutte contre le sida (PEPFAR) a diminué au fil du temps, les chercheurs suggèrent qu’une évaluation standard des conditions socio-économiques d’un patient devrait être incluse dans le cadre des soins de routine contre le VIH et que la protection sociale devrait être évaluée comme une stratégie visant à réduire davantage la mortalité des personnes vivant avec le VIH sous TAR dans les milieux à faible revenu».