Le Nouvelliste
« Il est trop facile d’indexer les artistes quand l’Etat n’est pas en mesure d’assumer ses responsabilités », dit BIC
March 8, 2021, midnight
On se souvient du chanteur vedette de Nu look, Arly Larivière, qui a été vertement critiqué par des animateurs de radio, des internautes pour avoir accepté de participer à un concert dans un quartier populaire à l’invitation d’un chef de gang recherché par la police. En fin de semaine, plusieurs rappeurs populaires haïtiens ont fait circuler des courtes vidéos promotionnelles annonçant la réalisation d’un spectacle à Village-de-Dieu, totalement contrôlé par des bandits armés. Ils ont été également sévèrement critiqués par des internautes et d’autres acteurs du milieu médiatique. « Il est trop facile de dire à Arly qu’il ne peut pas aller faire un concert pour un chef de gang. Il est plus difficile de demander à l’Etat de mettre la main au collet de ce chef de gang. Vous rendez l’artiste responsable que l’Etat ne fasse pas son travail... Pourquoi l’Etat existe-t-il ? », avance à l'émission " Haïti sa k ap kwit?" l’artiste BIC, qui n’entend pas fustiger le choix fait par certains artistes. Iriez-vous jouer pour «Kris la», du moins, pour le gang « Baz 5 segond » ? « Personnellement, s’il m’appelle pour venir jouer pour lui, je peux dire que je n’irai pas. Si j’identifie clairement que c’est un bandit qui m’appelle, je peux faire le choix de ne pas y aller... Mais il est trop facile de dire que les artistes ne doivent pas aller jouer pour le bandit, alors que celui-ci est identifié. Nous fonctionnons avec lui. Nous affirmons qu’ils font du social. Il est connu de tous dans la zone, alors que nous demandons aux artistes de ne pas aller jouer pour lui. C’est trop facile de le faire ainsi... », soutient l’artiste, qui souligne l’absence d’encadrement de la part des instances concernées en faveur des artistes haïtiens. « Je fais le choix de ne pas être de connivence avec des bandits. J’ai déjà fait mon choix. J’ai déjà trié mes amis. Je fais ce que je dois faire. Mais il est trop facile de critiquer... », estime BIC. « Si un bandit m’appelle, s’identifie comme tel et m’invite à venir jouer pour lui comme fanatique (nan yon fèt sosyal, paske se konsa bagay la prezante), d’une part, mon côté moral et engagé contre ses pratiques m’empêche de le faire. Cela ne m’intéresse pas. Mais d’autre part, la personne qui m’appelle me connait bien, je ne le connais pas. Il sait où j’habite et quelle est la marque de mon véhicule. Si je refuse, vous pensez que cela me rend plus intelligent ? L' Etat sait où est le bandit. Ils s’entendent et fonctionnent bien. L’Etat ne veut pas encore l’arrêter... », fustige BIC. « Vous ne savez pas ce qu’endurent les artistes que vous prenez pour des superhéros, des supermen. Mais ils sont aussi humains que nous avec un cœur comme nous. Lorsque vous recevez un appel d’un chef de gang qui vous demande directement de jouer (tenir un concert) pour lui, le refuser, c’est lui déclarer la guerre. Mais c’est déclarer la guerre avec quelqu’un que vous ne connaissez pas et que vous ne connaissez pas d’autant plus qu’aujourd’hui je fonctionne avec un véhicule déteinté. Qu’est-ce qui l’empêchera de me tirer dessus... ? », se préoccupe l’artiste. Toutefois, selon BIC, quelqu’un qui veut s’afficher avec un bandit, c’est son affaire. C’est sa vie personnelle. Pour lui, l’Etat devrait avoir une politique pour favoriser un meilleur mode de vie aux artistes. L’Etat s’arrange pour dérouter les artistes, croit celui qui n’a pas manqué de critiquer certains chanteurs haïtiens qui sont parvenus au plus haut niveau de l’Etat, mais qui n’ont pas mis en place les structures pour les encadrer.