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Le Nouvelliste

Une cartographie détaillée de la faille d’Enriquillo est disponible

Feb. 17, 2020, midnight

La faille de la presqu’île du Sud ou d’Enriquillo a longtemps été identifiée et plusieurs grands séismes historiques lui ont été attribués. L’une de ses premières cartographies remonte à 1975. Puis plusieurs aspects à des endroits spécifiques ont été abordés dans différents travaux scientifiques. Jusque-là, on savait sommairement où elle passait et la cartographie considérée la plus aboutie avait été publiée en 1995 (1). 25 ans après, une cartographie détaillée sur toute la longueur de la faille vient enfin d’être publiée le 6 février 2020 dans la revue scientifique Tectonophysics (2). Pourquoi une cartographie détaillée ? Il est vrai que la présence de la faille ainsi que les séismes qu’elle a déjà produits attestent de son activité. Cependant, pour certaines études sur la menace que représente cette faille, une cartographie détaillée est nécessaire. Par exemple, l’une des séries de données dont on a besoin pour évaluer cette menace est l’estimation du temps de retour des séismes majeurs sur cette faille. Pour cela, des études paléosismologiques doivent être menées sur le terrain le long de la faille pour remonter aux séismes passés. Comme ça, on pourra estimer tous les ans combien on a de grands séismes. Pour ces études, il faut qu’on arrive à mettre le doigt sur la faille, d’où l’importance d’une cartographie précise et détaillée. Si l’on pense reconstruction, il faut savoir exactement où l’on peut désormais construire. Une cartographie de faille avec seulement des incertitudes de quelques mètres conduisent forcément à de meilleures décisions de construction qu’une cartographie dont les incertitudes sont de plusieurs kilomètres. La cartographie précise permet d’avoir une idée sur comment la faille est segmentée, c’est-à-dire de repérer ses changements de direction et ses discontinuités le long de la presqu’île du Sud. Cet aspect est extrêmement important dans l’évaluation de la menace sismique. Les séismes se produisent souvent sur un segment à la fois et la longueur des segments permet d’estimer les magnitudes auxquelles on peut s’attendre. Cette cartographie pourra améliorer les cartes de risque, les études de microzonage sismique, les codes de construction et les plans d’aménagement du territoire. En quoi notre cartographie est-elle précise et détaillée ? Au lendemain du séisme du 12 janvier 2010, de vastes campagnes d’acquisition de données géospatiales ont été réalisées. Il y avait du LiDAR (Light Detection and Ranging) qui est une technologie utilisant un laser embarqué dans un avion pour imager le paysage. Ces images permettent de voir des objets d’un mètre d’envergure sur le sol. Il y avait des photographies aériennes sur lesquelles on peut voir des détails aussi petits que 30 centimètres d’envergure. Ces images sont dites de « haute résolution spatiale ». Ces données qui permettent d’identifier beaucoup de détails ont été utilisées dans notre cartographie. On a cherché à voir des éléments du relief déformés à cause de la faille. Des investigations sur le terrain ont aussi été réalisées. Nous avons cartographié la faille d’abord à l'échelle de la péninsule du Sud. À cette échelle, des données de moyenne résolution suffisent. Ensuite, nous avons divisé la péninsule en cinq parties. À chaque partie, et grâce aux données haute résolution, nous avons progressivement diminué l’échelle de vue jusqu’à des dizaines de mètres, voire jusqu’à l’échelle du terrain. Enfin, tous les bouts de carte ont été joints et géoréférencés pour avoir également la carte précise de toute la faille à l’échelle de la presqu’île du Sud d’Haïti. Comment accéder à la carte ? Pour les bouts de carte, les données précisément utilisées, l’analyse du paysage et les arguments nécessaires à la cartographie, vous pouvez consulter l’article scientifique (2): https://doi.org/10.1016/j.tecto.2020.228368. Pour avoir la carte générale dans un format qui soit prêt à être utilisé dans un système d’information géographique, il suffit d’envoyer une demande à: newdeskarl@gmail.com. Remerciements au Bureau des mines et de l’énergie et au Centre national de l’information géospatiale. (1) Mann, P., Taylor, F.W., Edwards, R.L., Ku, T.-L., 1995. Actively evolving microplate formation by oblique collision and sideways motion along strike-slip faults: an example from the northeastern Caribbean plate margin. Tectonophysics 246, 1–69. (2) Saint-Fleur, N., Klinger, Y., & Feuillet, N. (2020). Detailed map, displacement, paleoseismology, and segmentation of the Enriquillo-Plantain Garden Fault in Haiti. Tectonophysics, 778, 228368. https://doi.org/10.1016/j.tecto.2020.228368