Le Nouvelliste
Cap-Haïtien : Des médecins sauvent des triplés issus d’une césarienne post mortem
Oct. 7, 2020, midnight
Originaire de La Tortue, Élmina Liberus, 32 ans, a passé plus de dix ans à Providentiales avant d’être déportée en Haïti en 2017 avec son amie Anna Fénélon. En quittant cet archipel britannique, Élmina a confié à ses deux enfants nés d'un même accouchement à Providentiales à leur « marraine ». La jeune femme de 32 ans s’est installée chez son amie Anna au Cap-Haïtien où elle a été déportée. Ne pouvant pas supporter l’enfer du sol natal, Anna a tenté de retourner aux Iles Turques-et-Caïques quelques jours plus tard mais périra en mer avec une vingtaine de compatriotes dans une embarcation de fortune transportant quelque 60 passagers. Privée de son amie Anna, Élmina se fait réconforter dans la cité christophienne par le neveu de la défunte, Wadson Daniel, 17 ans, à l’époque. Près de trois ans après ce concubinage, Élmina est tombée enceinte. Elle est arrivée à l’hôpital universitaire Justinien (HUJ), le mercredi 30 septembre dernier, vers 18 heures, pour son accouchement. « Elmina était stable et se promenait quand brusquement elle fit une crise. On lui a alors appliqué le protocole de l'éclampsie. 10 minutes plus tard, elle a fait une deuxième crise, on a fait appel à l'aide pour la stabiliser. Au moment de la stabilisation, on a constaté le décès », a confié le Dr Jhon Cador Joseph, obstétricien-gynécologue de l'HUJ. Sur place, ce jour-là, à l’hôpital, la mère de Wadson Daniel, Marie-Lourdes Fénélon a immédiatement été informée du décès d’Élmina. « On lui a proposé de procéder à une intervention de sauvetage des fœtus sur Élmina. Elle a accepté et on a procédé à une section césarienne sur le cadavre pour sauver les trois bébés », a raconté le médecin dans un luxe de détails. « Les triplés sont nés par césarienne. On avait déjà posé le diagnostic opératoire, on n'allait pas la laisser accoucher par voie basse car elle était une ancienne césarisée lors de la première grossesse », a indiqué le médecin. Une semaine environ après leur naissance, les triplés sont en pleine forme, à l’exception du garçon dont l’état de santé est moins rassurant, a rapporté le Dr Joseph. « Les bébés sont nés avec un apgar très pauvre, c'est-à-dire qu'ils avaient besoin d'une réanimation rapide. Ce qui a été fait immédiatement après leur extraction par un pédiatre. Le garçon est né en premier et ensuite les deux autres filles. » Sans ressources, la maman de Wadson a pris en charge les enfants et contrairement aux premières informations, leur père est bien aussi présent à l’hôpital. Âgé aujourd’hui de 22 ans, le jeune papa est dépourvu de tout et n’a même pas un téléphone, raconte sa mère, «parce qu’il a récemment vendu le sien pour faire face aux réalités de la vie courante». « C’est la sœur de la défunte, Fédeline Libérus, qui possède un téléphone... mais, on n’a pas son numéro en tête », a révélé la belle-mère des triplés. Des sources proches de l’hôpital nous ont appris que les parents n'ont pas de moyens de se procurer le lait pour les nourrissons qui sont toujours à la pédiatrie de l’hôpital universitaire Justinien. En dépit de tout, les parents ne comptent pas donner les nouveau-nés en adoption. « Nous avons besoin d’aide présentement, mais on ne peut rien décider pour l’instant à propos de l’adoption. Les parents de la défunte n’ont pas encore été informés de sa mort », nous a confié Marie-Lourdes.