Le Nouvelliste
Covid-19 : l’Exécutif dépense ; place aux bons comptes avec la CSC/CA
June 8, 2020, midnight
2,247,220,289 de gourdes et 34,202,778.04 millions de dollars américains ont été décaissés dans le cadre de la réponse de la réponse à la Covid-19, a informé le ministère de l’Economie et des Finances fin mai. Si les montants alloués, tirés du Fonds d’urgence (FDU) et du Trésor public (TP) sont connus et leurs bénéficiaires désignés par le MEF, la CSC/CA ne croule pas encore sous le poids des contrats passés et de l’ensemble des pièces justificatives engageant l’Etat, presque trois mois après la déclaration de l’état d’urgence par l’administration Moïse/Jouthe le 19 mars, a appris le journal, lundi 1er juin 2020. Le Premier ministre Joseph Jouthe, au cours du mois d’avril, a envoyé quelques correspondances, transmettant quelques factures, cotations et pro forma du MSPP à la CSC/CA, ont poursuivi nos sources, soulignant que la cour, comme c’est la norme au niveau administratif, a répondu et indiqué avoir reçu ces « informations ». « Le conseil prend note, sous réserves des dispositions légales entourant l’action que le MSPP envisage de faire », ont souligné nos sources, au courant de la réponse du conseil à l’une des correspondances responsives au Premier ministre Joseph Jouthe. « La Primature a acheminé une simple correspondance à la Cour pour l’informer sur des acquisitions effectuées par le MSSP », avaient confié d’autres sources interrogées par Le Nouvelliste au début et à la mi-mai. La Cour n’a pas été sollicitée ni pour consultation ni pour avis. La Cour prend note de cette information sous réserve des dispositions légales, a redit l'une de nos sources, soulignant que le gouvernement qui passe les contrats qu’il juge nécessaires selon les procédures célères prévues par la réglementation sur les marchés publics doit consulter et avoir l’avis de la CSC/CA. La CSC/CA est un passage obligé ; elle doit donner son avis sur « tous les projets de contrats à caractère financier ou commercial auxquels l’Etat est partie », conformément à l’article 200-4 de la Constitution, a poursuivi cette source. Par ailleurs, même pour un marché de gré à gré, il faut communiquer un argumentaire à la CSC/CA et s’assurer que les intérêts de l’Etat sont garantis, a-t-elle ajouté. Au niveau de la Cour, il n’y a aucune volonté de mettre des bâtons dans les roues de l’Exécutif. S’il y a une volonté de transparence, tout le monde jouera sa partition, a confié au journal notre source proche de la CSC/CA. Par rapport à la célérité, à l'urgence, on fait en général l’appel d’offres restreint (AOR), le marché de gré à gré ou par entente directe. L’urgence d’exécution du marché doit être reconnue vitale, sans sacrifier les principes établis dans la loi, à savoir la libre accès à la commande publique, l’égalité de traitement des soumissionnaires, la transparence des procédures et le respect de l’éthique, a-t-elle expliqué, soulignant que l'état d'urgence doit permettre d'accélérer la procédure et non éviter ou contourner les procédures. PM Jouthe se retranche derrière l’état d’urgence et une autorisation de la CSC/CA à effectuer des transactions Le Premier ministre Joseph Jouthe, interrogé mercredi 20 mai 2020 par Le Nouvelliste, a confié être en contact avec la CSC/CA. « La CSC/CA, avec laquelle j’ai partagé plusieurs correspondances, m’a autorisé à faire les transactions et elle fera les contrôles a posteriori. Le MSPP a pratiquement finalisé tous les documents pour les acheminer à la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif », a assuré le chef du gouvernement. Contacté le mercredi 3 juin, le Premier ministre Joseph Jouthe a maintenu ses déclarations et souligné avoir une correspondance de la cour indiquant qu’elle peut faire « leur contrôle a priori tout comme a posteriori. » « Je ne suis pas un politicien. Je suis un professionnel qui fait de la politique. Cela veut dire que je le fais avec art et méthode. Dans ma dernière déclaration, j’ai remercié Dieu d’être un homme libre, sans redevances envers quiconque. Personne ne me dicte mon comportement. Ni ce que je dis ni ce que je fais. J’agis selon la loi. C’est tout ce que je peux vous répondre. Mais je sais que j’ai une correspondance qui indique qu’ils peuvent faire leur contrôle a priori tout comme a posteriori », a longuement expliqué le Premier Joseph Jouthe au journal. « La loi d’urgence m’avait déjà donné l’autorisation de le faire sans parler à la CSC/CA qui, de toute façon, exercerait son contrôle a posteriori. Mais j’ai pris le soin d’écrire, de partager des e-mails avec la Cour, de discuter très souvent avec eux au téléphone », a indiqué le Premier ministre Jouthe. « Je ne veux pas faire des bêtises. Je ne veux pas pleurer comme Bellerive ni ne prendrai pas le maquis comme des collègues et des amis ministres », a-t-il dit, assurant, au passage, qu’il travaille étroitement avec la Commission nationale de passation des marchés publics. « Tout est fait en bonne et due forme. J’ai toujours l’avis de la CNMP. C'est beaucoup plus facile, parce qu’à la CNMP il y beaucoup de techniciens. Ils ne fonctionnement pas comme la Cour qui est un tribunal administratif dont la mission est d’auditer, de vérifier pour avoir quelque chose à dire de toutes les façons lorsqu’elle réalise ses audits », a indiqué le Premier ministre Joseph Jouthe. « Aujourd’hui, j’ai adressé une correspondance formelle à la ministre de la Santé publique pour lui demander de donner des suites à tous les dossiers déposés à la CSC/CA et de me communiquer les accusés de réception », a informé le PM. Le ministre de l’Economie et des Finances, Michel Patrick Boivert, interrogé le 11 mai sur le fait que le contrat des 18 millions de dollars et d’autres ne sont pas acheminés à la CSC/CA pour consultation et avis, a indiqué : « Ils le seront. Sachant que cette formalité peut être remplie après coup. » « L’idéal serait qu’on la remplisse avant. Je crois qu’on doit aller vers ça », a ajouté le ministre. Selon Gilbert Mirambeau, l’état d’urgence n’est pas un boulevard… Gilbert Mirambeau, le premier à lancer #KotKobPetroCaribeA, interrogé par le journal en mars, ne mâche pas ses mots. « L'état d'urgence n'est pas synonyme de voie libre au vol. Il y a une procédure allégée qui est tracée, et qui devrait permettre une fois l'état d'urgence passé de justifier les dépenses occasionnées pour gérer la crise », croit le Petrochallenger. « De plus, a-t-il poursuivi, il faut un plan d'intervention clair et pragmatique. C'est ce plan qui permettra aux institutions et à la population de suivre correctement la cohérence des actions gouvernementales conformément à l’article 7, alinéa 1 de la loi sur l'état d'urgence. Lajan Leta se lajan NOU ! » « En absence d’un Parlement fonctionnel, une institution technique comme la Cour supérieure des comptes et du Contentieux administratif qui est toujours en place a un rôle crucial à jouer pour prévenir la corruption », a appelé Gilbert Mirambeau. Rapport sur l’état d’urgence, en attendant le Parlement… Pour le moment, l’administration Moïse/Jouthe n’est assujettie à aucun corset d’organismes de contrôle.. L’Exécutif est tenu de fournir au Parlement un rapport sur les dépenses effectuées trois mois après la fin de l’étant d’urgence. Or, il n’y a pas de Parlement. Et c’est sous l’égide de l’état d’urgence qu’ont été signés des contrats sous de précédentes administration ayant disposé à l’époque des fonds du programme PetroCaribe. Certains de ces contrats sont au cœur du scandale PetroCaribe dont les soubresauts ont fait vaciller le début de la présidence de Jovenel Moïse, a fait remarquer une source interrogée par le journal, estimant que la transparence est indispensable. Pour bien faire et protéger ceux qui agissent dans l'urgence pour face à la pandémie, a-t-elle insisté. Par rapport aux dépenses engagées ou sur le point d’être engagées dans la réponse à la Covid-19, plusieurs partenaires et bailleurs de fonds ont souligné l’urgence pour l’administration Moïse/Jouthe l’urgence de jouer la carte de la transparence et de la reddition de comptes. Par ailleurs, un analyste interrogé par le journal a encouragé les ordonnateurs et les contrôleurs à harmoniser leurs violons. Il faut que la CSC/CA soit plus claire, à la limite plus pédagogique, afin d’aider les ordonnateurs à agir dans le strict respect de la loi et de la Constitution. « Les crocs-en-jambe et "m ap fè w kite frekan lè w pa chèf" ne serviront à rien », soulignant que dans le cadre de la Covid-19, l’Exécutif dépense, maintenant place aux bons comptes avec la CSC/CA. Roberson Alphonse