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Le Nouvelliste

Diffamation : que prévoit le nouveau code pénal ?

Aug. 4, 2020, midnight

Selon le nouveau code pénal, la diffamation s’entend comme une allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel il est imputé. Qu’elle soit publique ou non, la diffamation est punissable. Elle est aggravée lorsqu'elle présente un caractère discriminatoire.  À ce propos, l’article 428 prévoit que la publication directe ou par voie de reproduction de ces allégations ou de ces imputations est punissable lors même qu’elle serait faite sous forme dubitative, vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l’identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés. En conséquence, il n’est donc pas nécessaire que la personne diffamée soit nommément identifiée; le fait qu’elle est clairement identifiable suffit. Il en découle qu’ajouter un point d’interrogation, ou user du conditionnel, ou reproduire les propos incriminés ne vous évitera pas d’être épinglé(e) pour diffamation. Cependant il n’y a pas de diffamation quand il s’agit de faits dont la loi autorise la publicité, ou de faits que l’auteur de l’imputation est, par la nature de ses fonctions ou de ses devoirs, obligé de révéler ou de réprimer (article 429). Ce nouveau code expose les divers moyens par lesquels la diffamation peut être commise, notamment les discours, cris ou menaces proférés dans les lieux ou réunions publics, les écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l’écrit, de la parole ou de l’image, vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans les lieux ou réunions publics, les placards ou affiches exposés au regard du public, les moyens de communication au public par voie électronique. D’après l’article 430 du nouveau code pénal, quand la diffamation est commise envers des particuliers, elle est passible d’un emprisonnement d’un an à trois ans et d’une amende allant de 25 000 à 50 000 gourdes, tandis que sous l’égide du code pénal de 1835, elle emportait une peine d’emprisonnement d’un an à trois ans et d’une amende de trois cents à mille cinq cents gourdes, quand les faits imputés étaient de nature à mériter la peine de travaux forcés à perpétuité. Dans les autres cas, la diffamation était punie d'une peine d’emprisonnement de six mois à un an et d’une amende de cent à cinq cents gourdes dans le code pénal qui sera abrogé par le nouveau. (article 316 du code pénal de 1835) Le nouveau code pénal punit la diffamation ayant un caractère raciste, sexiste, homophobe, discriminatoire. Ces préoccupations n’étaient pas prises en compte par le législateur dans le code précédent. En effet, quand le nouveau code pénal sera en vigueur, le délit de diffamation sera aggravé si elle vise une personne ou un groupe de personnes en raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race, une religion déterminée ou en raison de leurs opinions politiques, en raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap, conformément aux prescrits de l’article 430. La peine prévue dans ces cas consiste en un emprisonnement de 2 à 3 ans et une amende de 50 000 à 100 000 gourdes. De plus, le tribunal pourra proclamer une peine d’affichage dans les lieux publics pour une durée qui ne peut excéder deux  mois ou de diffusion de l’intégralité ou d’une partie de la décision prononcée dans une ou plusieurs publications de presse ou service de communication au public par voie électronique.  La personne accusée de diffamation peut se défendre et tenter d'échapper à la condamnation en proposant de prouver l'authenticité des faits mis en cause, car le nouveau code pénal admet que la vérité des faits diffamatoires puisse être toujours prouvée. Cependant cette règle souffre d’au moins trois exceptions évoquées à l’article 431 du code. En règle générale, la preuve de la vérité ne pourra jamais être apportée si l’imputation concerne la vie privée de la personne se réfère à des faits qui remontent à plus de dix ans, ou à un fait constituant une infraction amnistiée ou prescrite ou qui a donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision.  La personne accusée de diffamation ne pourra donc, pour se défendre, prouver les accusations concernant la vie privée du plaignant que si ses propos portent sur des accusations d’infractions sexuelles sur mineur prévues aux articles 469 à 472 du code, en l’occurrence le fait de provoquer directement une personne mineure à commettre un crime ou un délit, de favoriser ou de tenter de favoriser sa corruption, le fait par une personne majeure de faire des propositions sexuelles à une personne mineure âgée de 15 ans au plus, le fait de fixer, d’enregistrer ou de transmettre l’image ou la représentation d’une personne mineure en vue de de sa diffusion lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique ou encore  d’offrir, de rendre disponible ou de diffuser une telle représentation. Ces spécificités n'étaient pas prises en compte antérieurement.   Même si le critère de publicité est déterminant dans la constitution de l’infraction de diffamation, le code pénal punit également la diffamation non publique (privée). En effet, ce nouveau code punit encore plus sévèrement la diffamation si elle a des motifs homophobes, racistes, sexistes, bref, discriminatoires. L’article 955 consacre que la diffamation non publique envers une personne est passible de l’amende prévue pour les contraventions de la première classe, c’est-à-dire de 100 à 1 000 gourdes et jusqu’à 50 000 gourdes en cas de récidive (article 54). Par ailleurs, l’article 970 sanctionne la diffamation non publique commise envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race, une religion déterminée, un parti politique, ou encore en raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap, à l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe, c’est-à-dire à une amende comprise entre 400 et 4 000 gourdes, 50 000 gourdes maximum en cas de récidive. Outre les amendes susmentionnées, les auteurs de diffamation non publique présentant un caractère raciste, homophobe ou discriminatoire encourent aussi des peines complémentaires consistant en l’interdiction de détenir ou de porter, pour une durée de six mois au plus, une arme soumise à autorisation, ainsi que la confiscation d’une ou de plusieurs armes dont la personne condamnée est propriétaire ou dont elle a la libre disposition.