Le Nouvelliste
Le nouveau budget et les crises sociopolitiques répétitives
Nov. 5, 2020, midnight
Le budget est l’outil le plus universel et le plus puissant de l’économie. Elaboré dans un contexte post-COvid-19, le budget 2020-2021, avec des prévisions de 254 milliards de gourdes contre 198 milliards pour l’année passée, table sur une augmentation du financement de la Banque centrale qui passe de 30 à 37 milliards de gourdes et se veut être une réponse articulée de la gestion planifiée des dépenses publiques en tenant compte de la raréfaction des ressources. La feuille de route budgétaire s’articule désormais autour de sept (7) principaux chantiers : le paiement des dettes de l’Etat, la relance économique, le financement des activités électorales, l’ajustement des salaires des employés et fonctionnaires publics, les investissements dans les secteurs de l’énergie et de l’agriculture, le renforcement de l’appareil sécuritaire, le tout prenant en compte les règles de bonne gouvernance. La pandémie de Covid-19 a davantage plombé les perspectives macroéconomiques déjà difficiles. C’est une catastrophe pour le monde entier. Faisant mentir les prévisions catastrophistes, le pays a été épargné jusqu’ici, en comparaison à d’autres nations, par la pandémie mais continue à être frappé par un autre virus : l’instabilité politique avec ses fâcheuses conséquences sociales, économiques, sécuritaires, institutionnelles. Une croissance du PIB de l’ordre de 2.4% ; Une inflation de fin d’exercice estimée à 18.2% en glissement annuel ; Des recettes fiscales projetées à 132,6 milliards de gourdes ; Des recettes fiscales projetées à 132,6 milliards de gourdes ; Une pression fiscale de 8.4% (la pression fiscale a été révisée suite à l’élargissement de la base des comptes nationaux de l’IHSI) contre 6.5% l’année précédente ; Des émissions nettes de trésorerie à 25 milliards de gourdes ; Un financement monétaire limité à 37, 1 milliards de gourdes. Telles sont les principales perspectives et les hypothèses macroéconomiques retenues dans le cadre du budget 2020 – 2021 adopté en Conseil des ministres le mercredi 30 septembre 2020 qui vise les objectifs suivants : un relèvement de la croissance ; une accélération de la création d’emplois par l’extension des parcs industriels et des zones franches et la création d’entreprises, notamment les micro, petites et moyennes entreprises dans les secteurs porteurs en particulier : l’agro-industrie ; le tourisme, par le développement du tourisme local et du tourisme de croisière ; l’immobilier en encourageant les initiatives privées, les partenariats public-privé (PPP ; et le numérique. Il y a donc là une vision, une feuille de route. Pour bien apprécier ces efforts, il faut voir la somme de défis et de problèmes auxquels le pays fait face. Pour bien fixer les idées, insistons sur quelques thèmes-clés. Cette situation économique précaire est aggravée en fait par les crises sociopolitiques avec pour corollaire que le dynamisme de la politique est incertain, en creusant le déficit public, la dette, les pertes des secteurs privé et informel. Le peyi lòk, qui a entraîné des licenciements massifs, a provoqué aussi une flambée des prix dans un pays qui est aujourd’hui le théâtre d’une vague d’insécurité en tous genres. A cet effet, voici les axes prioritaires du nouveau budget soumis, rappelons-le, à des aléas importants à cause de la situation sociopolitique : le renforcement de la sécurité et de l’État de droit pour redonner confiance à la population et faciliter aux opérateurs privés l’exercice de leurs activités; le renforcement des services d’infrastructures existants pour réduire les coûts de production et contribuer à l’amélioration de la compétitivité de l’économie ainsi que l’accès à l’énergie ; le renforcement des politiques d’inclusion sociale pour répondre aux urgences engendrées par les crises sociopolitiques répétitives dont les effets ont été exacerbés par la pandémie de COVID-19 ; et l’amélioration de la gouvernance, c’est-à-dire l’efficacité de la gestion publique. « L’analyse des crédits de fonctionnement place le service de la dette, les interventions publiques et « les dotations spéciales/subvention au secteur de l’énergie » au premier rang en raison des efforts de transparence du budget en intégrant depuis le budget précédent l’ensemble des ressources et dépenses du pouvoir central et, d’autre part, le renforcement de la crédibilité de l’Etat à travers le respect de ses engagements pris envers les tiers », a indiqué le ministre de l’Economie et des Finances, Michel Patrick Boisvert, qui a précisé aussi que « l’analyse de la répartition sectorielle de l’enveloppe budgétaire, pour refléter la réalité, doit tenir compte d’au moins trois critères : la part allouée au fonctionnement qui est supportée exclusivement par le Trésor public, le financement interne des programmes et projets et les dépenses d’investissement financés par les dons et emprunts. » Le gouvernement avait aussi prévu de subventionner les produits pétroliers à hauteur de 7,6 milliards de gourdes, l’année dernière. Mais il a pu collecter 4,6 milliards de gourdes, au final, sur lesdits produits. A titre de subvention, l’Electricité d’Haïti (ED’H) va recevoir 16 milliards de gourdes à partir de la rubrique « Dotations spéciales et subvention au secteur de l’énergie », du budget 2020 – 2021. Dans le détail, ce montant qui représente 6,3% de l’enveloppe budgétaire globale, s’applique au fonctionnement. Tout une série de mesures sont envisagées par le Directeur général de l’Autorité nationale de régulation du secteur de l’énergie (ANARSE) Evenson Calixte, pour redresser la situation commerciale désastreuse de l’ED’H afin de lui permettre d’atteindre l’équilibre recettes-dépenses. C’est sans doute le plus grand casse-tête institutionnel et technique de notre temps. Le gouvernement va emprunter 16,3 milliards de gourdes auprès du secteur bancaire haïtien pour financer l’acquisition de centrales électriques en liant avec le projet de renforcement du réseau métropolitain financé par le prêt de Taïwan qui va permettre de s’assurer de la disponibilité du courant pour les clients. Autrement dit, résoudre ce problème national récurrent, c’est un programme qu’on peut trouver insoluble mais c’est un point de passage pour accéder à d’autres succès collectifs. « Hormis le secteur des « Autres Administrations » regroupant les crédits qui, de par leur caractère spécifique et transversal, ne peuvent être affectés à un ministère en particulier, a-t-il ajouté, c’est au ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle (MENFP) qu’est octroyée la part la plus importante du budget de fonctionnement (23,9 milliards de gourdes, soit 13,3% du total. Mais tout de suite après le service de la dette vient le (MTPTC) Ministère des Travaux publics, Transports et Communications (44,15 milliards de gourdes dont 42,5 milliards d’investissement, soit 96% du total alloué à ce ministère). Le MENFP occupe la troisième place avec 29 milliards de gourdes suivi des Interventions publiques et du MJSP, respectivement 20,9 et 20,6 milliards de gourdes. A juste titre, le MJSP avec notamment le personnel policier et des engagements pris en matière de sécurité et de lutte contre la criminalité, occupe un nouveau rang avec un poids de 10%, soit 17,8 milliards de gourdes. » L’amortissement de la dette a plus que doublé en atteignant 43 milliards contre 17 lors de l’exercice précédent. Là on a affaire à une question importante, incontournable. Premier poste de dépense du budget national, il connait une augmentation vertigineuse de plus de 100% par rapport au montant de 20,06 milliards de gourdes allouées à ce poste de dépense dans le budget 2019- 2020. Plus précisément, il est passé de 17 à 43 milliards de gourdes (une hausse de 153 % en un an). « Au cours des 11 dernières années, le service de la dette (amortissement et intérêt sur la dette d’Haïti envers l’étranger) a explosé, a rappelé Thomas Lalime. Il est passé de 2.2 en 2010 – 2011 à 49 milliards de gourdes en 2020 – 2021 : il a donc été multiplié par 22. » Mais d’autres caractéristiques frappantes du nouveau budget méritent d’être soulignées. Et c’est bien ce qu’il faut faire pour être en phase avec l’actualité. De ce montant faramineux, il y a 43 milliards de gourdes consacrées à l’amortissement de la dette et 6,1 milliards au paiement des intérêts, soit au total 49.2 milliards de gourdes. L’État paiera 6,7 milliards de gourdes, principal et intérêt, aux compagnies pétrolières. Les 53 millions de dollars envers Novum seront payés ainsi que 117 millions de dollars cette année « sur des prêts envers la communauté internationale », a indiqué le ministre de l’Économie et des Finances. La subvention à l’ED’H est plus importante que les allocations budgétaires des ministères de l’Agriculture, de l’Environnement, du Tourisme, des Affaires sociales cumulées, peut-on noter avec inquiétude. Quand on considère le faible taux de facturation et les pertes en tous genres de l’ED’H, on comprend l’ampleur du financement que l’Etat consent pour la maintenir sous perfusion depuis des décennies. En ce qui a trait au budget précédent, la subvention à l’ED’H connaît une diminution. Elle était chiffrée à 18 milliards de gourdes dans le budget 19-20. La facture pétrolière associée au secteur de l’énergie a révélé un ensemble de dysfonctionnements, de déficits dus à la subvention et elle a un impact négatif sur l’économie nationale et les investissements publics. À ces créances, il faut ajouter celles vis-à-vis de l’AAN, APN, OAVCT, a souligné le grand argentier. Toutefois, il y a une éclaircie, un grand changement. Le rétablissement des recettes pétrolières, qui est pour le pouvoir une sorte de bouée de sauvetage, survient à un moment crucial. La gourde qui s’est appréciée en octobre 2020 à un rythme phénoménal lui a permis d’annuler la subvention des prix du carburant pour appliquer la loi du 9 mars 1995 relative au flottement des prix des produits pétroliers suivant le marché mondial. Le savait-on ? C’est encourageant, mais la situation est toujours incertaine, grave. Si la priorité absolue est donnée au paiement des dettes, le budget post-Covid insiste parallèlement sur une action forte pour la lutte contre l’insécurité, les troubles politiques à répétition et le banditisme qui font baisser les recettes publiques. La crise du coronavirus a lourdement pesé sur le budget précédent. Les crédits des ministères de la Justice et de la Défense sont révisés de manière à leur permettre de mieux combattre l’insécurité et garantir la libre circulation des biens et des personnes, en priorisant les zones à fort potentiel productif et touristique. C’est le ministère le plus doté du budget : du jamais vu. Cette nouvelle orientation se fait à travers le renforcement de Police nationale d’Haïti et les Forces armées d’Haïti (FAD’H). C’est d’ailleurs l’un des points saillants qui mettent en relief ce budget. Aujourd’hui, le vide sécuritaire risque de faire perdre encore plus de temps au pays alors que la fuite des cerveaux et des capitaux s’accélère, les faillites d’entreprises se multiplient et la valeur des actifs humains, institutionnels et physiques continue de fondre. Cela rend la reprise d’autant plus difficile. Il faut de toute urgence renforcer les appareils de sécurité, pour espérer renouer avec la croissance dans un horizon de trois à cinq ans. Si cette question dramatique – l’insécurité et le renforcement des forces de l’ordre face au risque d’un embrasement sécuritaire majeur – résonne bruyamment avec l’actualité, elle paraît quelque peu transpartisane. L’insécurité en hausse continue a au moins une vertu, celle de nous amener, comme l’a souligné le sénateur Youri Latortue, à nous interroger sur les limites et les lacunes structurelles de la PNH qui semble être dépassée par les événements. Au juste, il faut mentionner que cette dernière, critiquée à foison et à raison, a une enveloppe de 16,7 milliards de gourdes (+ 5,7 milliards) alors que l’armée a 1,4 milliards de gourdes (+ 0,4 milliards de gourdes) : ses deux institutions qui ont, respectivement, pour fonction principale d’assurer la sécurité interne et la sécurité externe du pays. Tout est à faire et à refaire ici-bas. Difficile de ne pas y voir un signe fort. C’est tout, sauf une orientation anodine. Pour combattre l’insécurité, certes. Pour le pays tout entier surtout. En ce sens, le « retour en grâce » des FAD’H doit plus à la recherche de l’équilibre et à la complémentarité des forces de l’ordre qu’à l’enthousiasme général ou au consensus national. Reste à savoir s’il s’agit là d’un début de renouveau écrasant tous les pessimismes à l’avenir. Pour garantir les acquis démocratiques, un Conseil électoral provisoire (CEP) a été installé et des crédits budgétaires sont prévus pour le financement des activités électorales : 3,1 milliards de gourdes sont octroyées aux « activités électorales » et 500 millions comme « support aux partis politiques ». Dans ces conditions, pour préserver la santé de notre démocratie en quête de stabilité et la sécurité des citoyens, il est primordial de faire preuve d’une opiniâtre vigilance et d’un engagement résolu en apportant à la machine électorale un soutien indéfectible, il emporte d’œuvrer, concomitamment, à la stimulation du dialogue politique et au renforcement de la sécurité publique. Il est vrai que finances et élections sont difficilement mesurables chez nous. Etablir une corrélation entre les deux l’est encore plus. Il est à signaler donc que l’année prochaine est censée être une année électorale sous haute tension. L’approche la plus directe, qu’à force d’incertitudes et de controverses dans notre démocratie en crise nous oublions souvent, est de revenir à la loi, telle qu’elle est établie par nos législateurs. La loi sur le financement des partis politiques en est un bon exemple. Cette question fondamentale n’a jamais cessé de tourmenter les analystes. Beaucoup d’entre eux sont à l’affût des données, pensant qu’un accès rapide leur révélera des relations ou des modèles statistiques exacts. Autre point saillant de ce budget : l’ajustement significatif de 8 à 55% de salaire pour les fonctionnaires. Une mesure pertinente dans un pays où la répartition des richesses est parmi les plus inégalitaires au monde. En dépit des contraintes financières rendant difficile les arbitrages budgétaires, une augmentation des crédits alloués aux dépenses de personnel de toutes les entités administratives est accordée pour prendre en compte l’augmentation du salaire minimum dans la fonction publique en application de l’arrêté du 30 octobre 2019 fixant le salaire minimum à compter du 1er novembre 2019. Malgré ce contexte budgétaire et financier dégradé, les catégories de salaires les plus faibles connaissent un ajustement plus élevé en pourcentage (partant de 55% appliqué au salaire minimum jusqu’à 8% pour les salaires les plus élevés). Il y a lieu de souligner que la masse salariale qui a déjà atteint des proportions inquiétantes pour les finances publiques, comme l’a rappelé lui-même le ministre Michel Patrick Boisvert à dessein. Avec la crise économique et sanitaire, on assiste ainsi à une revanche de la justice sociale. Au cœur des moments de crise, les discours sur les plus pauvres ou la misère ambiante ressurgissent souvent mais ne conduisent pas nécessairement à une véritable compassion au plus haut sommet de l’Etat. Ainsi la crise économique a-t-elle produit une formidable attention des décideurs pour les catégories de salaire les plus faibles au sein de l’administration publique. A la troisième place des crédits répartis par secteur on trouve le MEF (8,0 milliards de gourdes), expliqué par le nombre important de services techniquement déconcentrés et de l’ampleur de la réforme des finances publiques à travers surtout la création des postes comptables, le déploiement des contrôleurs financiers et la structuration du corps des inspecteurs généraux des finances. Précision de taille, avec deux préoccupations majeures en ce qui a trait à la gestion des finances publiques : celle de doter le pays d’un document de référence qui fait ressortir le niveau de perception des recettes et l’exécution des dépenses publiques dès le début du nouvel exercice et d’initier la première année de mis en œuvre du Plan de relance économique post-Covid (PREPOC 2020 – 2023). Au sein du budget adopté, l’élargissement et la mission des postes comptables, des contrôleurs financiers et des inspecteurs généraux des finances vont améliorer la gestion publique. Indépendamment de ses objectifs, la réussite de tout plan ou projet est tributaire de l’adoption des principes de bonne gouvernance et de reddition des comptes. Plusieurs fois évoquée par le chef de l’Etat haïtien, la bonne gouvernance, la réédition des comptes, la performance de la sphère publique et l’attractivité pour les talents et les compétences restent des conditions sine qua non pour la réussite de tout projet, surtout stratégique ou à envergure nationale. A cet égard, les institutions de l’Etat et les entreprises publiques doivent montrer une attitude exemplaire et agir comme un levier de développement, et non comme un frein, a rappelé le ministre Michel Patrick Boisvert. Pour lui, le succès du Plan de relance économique et la mise en place d’un nouveau contrat social nécessitent une évolution réelle des mentalités et un véritable changement dans le niveau de performance des établissements publics. Le ton est donné. Le Plan de relance économique est l’une des priorités inscrites dans ce budget. Le tournant imposé par la crise actuelle impose en effet un nouvel élan, davantage d’engagement et des profils à la hauteur des enjeux dans tous les secteurs. Parce que la réussite du Plan de relance économique se fera par l’intervention du secteur public qui a aujourd’hui grandement besoin de hauts cadres alliant compétence technique et managériale et un grand sens d’éthique et des responsabilités. L’instabilité politique enlève des marges de manœuvre pour les réformes en cours et à venir. Cela n’empêche pas d’essayer de se projeter vers l’avenir, ce qui n’est pas toujours facile. L’équipe gouvernementale espère ainsi restaurer un climat de confiance auprès des bailleurs. En effet, tenant compte de la mise en œuvre de certaines réformes, dans cette économie d’importation massive enchaînée au dollar, des politiques de diversification et de transformation structurelle de l’économie haïtienne pour soutenir la base productive et créer des emplois, la réduction de la facture des importations par la diversification des produits à l’export, une enveloppe substantielle est mobilisée pour implantation et la capitalisation de la BNDA qui, en raison de sa vocation, se révèle un outil indispensable dans la relance de l’économie, particulièrement du secteur agricole. Le ministère de l’Environnement (MDE) est retenu dans les priorités du nouveau budget, à travers la construction de 5 nouveaux centres de germoplasme (Ouest, Sud-Est, Artibonite, Centre, Nord-Est). Une autre question – et non des moindres – est celle du taux de change. En vue d’accompagner des entités impliquées dans l’application des mesures visant à favoriser le respect des circulaires du Ministère du Commerce et de l’Industrie (MCI) et de la BRH relatives au maintien de la stabilité du taux de change et la régularisation des prix des produits de première nécessité, des moyens sont mis à leur disposition. Haïti était secoué par sa pire crise économique depuis des décennies, marquée par une dépréciation inédite de sa monnaie ayant plongé près de la totalité de la population dans le désarroi. Le taux du marché officiel gravitait lui autour de 123 gourdes minimum pour un dollar dans le meilleur des cas, et pouvait même grimper au-delà de 130 gourdes chez certains agents illégaux. Plus inquiétant, ce taux aurait également été répercuté par certains changeurs agréés. Poursuivant sa dégringolade malgré les tentatives des autorités de juguler cette chute dans un pays en plein naufrage économique, empêtré dans une crise politique sans fin, cette dépréciation a été freinée en fin de compte à un taux plus ou moins raisonnable. Mais de nombreux facteurs sous-jacents militent en défaveur d’une stabilité pérenne de notre monnaie comme de notre vie publique. Ce sont, par exemple, des crises sociopolitiques répétitives et, par conséquent, des agrégats macroéconomiques affectant la stabilité des prix et la stabilité financière. Le lien entre le financement monétaire et les principales variables économiques – la valeur des recettes liées aux droits de douane et la hausse de l’inflation et du taux de change – s’en est trouvé profondément affecté. Les mesures envisagées dans le cadre de ce budget visent à contribuer à stabiliser l’économie, certes, mais tout va dépendre malheureusement des tensions ou perturbations sociopolitiques en grande partie. Cet ancrage est particulièrement important, surtout en période de crise, lorsque la banque centrale doit maintenir ou étendre la panoplie de ses instruments pour faire face à des problèmes exacerbés en grande partie par nos turpitudes politiciennes et affairistes. Pierre-Raymond DUMAS