Le Nouvelliste
Budget, taux de change, appréhensions dans le secteur textile : le ministre de l’Economie et des Finances donne des explications
Oct. 9, 2020, midnight
Dans le décret budget 2020-2021, le gouvernement haïtien table sur des prévisions de recettes domestiques de l’ordre de 132 milliards de gourdes avec un taux de change qui varie entre 70 et 72 gourdes pour un dollar américain. Neuf jours après la mise en application du budget, le taux de référence est d’environ 62 gourdes pour un dollar. Une réalité qui pousse déjà le ministre de l’Economie et des Finances, Michel Patrick Boisvert, à mettre en avant d’autres stratégies que le gouvernement va utiliser pour atteindre ses prévisions. « Il est vrai que la valeur en douane des marchandises va diminuer. Grâce aux mesures de renforcement des organes de perception qui vont ont être prises, les prévisions de recettes seront quand même atteintes », avance Michel Patrick Boisvert. Le titulaire du MEF annonce des dispositions en vue de renforcer les contrôles a priori et a posteriori sur les personnes qui débarquent au niveau de la douane. Le ministre confirme aussi que les autorités haïtiennes vont travailler avec leurs homologues dominicains en échangeant des informations sur les marchandises en provenance de l’autre côté de la frontière. Cela permettra la réduction de la contrebande, espère le ministre, qui ne croit pas qu’il sera nécessaire de revoir les prévisions de recettes domestiques à la baisse. Le niveau de financement prévu par le gouvernement est de 49 milliards de gourdes dont 37 milliards viendront de la Banque centrale. Certains craignent que ce plafond soit largement dépassé au cas où les prévisions de recettes ne seraient pas atteintes. « Nous donnons la garantie que ce plafond sera respecté », rassure le ministre. Il promet de « resserrer les dépenses » comme cela a été le cas à la fin de l’exercice 2019-2020 si cela est nécessaire. Dans l’espace d’un mois et demi, la gourde s’est renforcée d’environ 50% par rapport à la devise américaine. Le ministre de l’Economie et des Finances croit que ce miracle est lié à la « cohérence au niveau de l’action du gouvernement ». « C’est le fruit des mesures prises par les autorités qui ont conduit à cette baisse du taux », se félicite Michel Patrick Boisvert. L’objectif final, indique-t-il, c’est la stabilité au niveau du taux de change qui permettra aux agents économiques d’avoir de la prévisibilité dans leurs activités. Pour le nommer, le ministre affirme ne pas être en mesure de dire jusqu'à quel niveau la gourde va se stabiliser. Mais ce niveau sera atteint à partir du moment où le taux de change sera compatible avec les activités économiques et où il n’y aura pas trop de fluctuations, à en croire le ministre. Le gouvernement veut conserver les emplois dans le secteur de la sous-traitance Des patrons de la sous-traitance ont exprimé des appréhensions par rapport au renforcement de la gourde. Ils craignent la perte de plusieurs milliers d’emplois dans ce secteur à cause de cette situation. « On est conscient de la situation. Actuellement on travaille avec le secteur pour conserver les emplois », confie Michel Patrick Boisvert. Le grand argentier de la République confirme que plusieurs séances de travail ont déjà été réalisées avec les responsables de ce secteur qui emploie environ 50 000 travailleurs. Le ministère réfléchit sur plusieurs scenarii. « Nous analysons les tenants et les aboutissants ainsi que les coûts de chaque scénario », indique le ministre. En économie quelque soit l’intervention aura des effets Le ministre estime normal que le gouvernement rencontre des problèmes assez délicats suite à l’intervention de la BRH sur la marché des changes. « On est en économie. En économie quelle que soit l’intervention aura des effets. Et les impacts iront dans les deux sens : d’un côté on aura des avantages et d’un autre on aura des inconvénients », prévoit le ministre pour qui les avantages sont supérieurs aux inconvénients dans le cas de l’intervention sur le taux de change. « Que la population rencontre 50% de son pouvoir d’achat, ce n’est pas négligeable », soutient Michel Patrick Boisvert. Le ministre de l’Economie et des Finances affirme que l’appréciation de la monnaie fait renchérir le coût du bien produit local et diminue la compétitivité de ce bien. Mais, nuance-t-il, Haïti n’exporte grand-chose. Selon le ministre, ce n’est pas l’appréciation de la gourde qui va provoquer un déséquilibre au niveau de la balance commerciale. Quand le dollar s’échangeait à 125 gourdes cela n’avait favorisé non plus l’exportation des produits haïtiens. Michel Patrick Boisvert parie encore sur la stabilité de l’économie, notamment sur le taux de change pour « avoir un niveau d’exportation compatible aux activité économiques ».