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Le Nouvelliste

« Fantom 509 »: un baptême enflammé pour Léon Charles

Nov. 20, 2020, midnight

Une dizaine de véhicules incendiés, des routes bloquées, des citoyens terrorisés courant dans tous les sens pour rentrer chez eux… le groupe Fantom 509, qui se réclame de la police nationale, a encore semé la terreur dans la capitale le vendredi 20 novembre. Leurs revendications cette fois : un salaire de base de 50 000 gourdes, une carte de débit de 25 000 gourdes, des moyens de fonctionnement, entre autres. Tout se déroulait sous les regards passifs de leurs frères d’armes de service… « Léon Charles n’était pas au pays, les Fantom lui souhaitent la bienvenue. Men sa ki Fantom 509 la ! », a lancé un policier cagoulé très agité et arme à la main qui parcourait les rues de la capitale en compagnie d’autres membres de l’organisation Fantom 509. Leurs cibles privilégiées: les véhicules officiels ou Service de l’État, mais aussi des véhicules de transport de marchandises. Sur leur parcours, ces véhicules ont été incendiés. De Port-au-Prince à Pétion-Ville, les membres de cette organisation, appuyés par des gens à moto, ont semé la panique sur leur parcours. Des automobilistes terrifiés couraient dans toutes les directions pour éviter la fureur de Fantom 509 et des entreprises fermaient leurs portes en catastrophe. « Nous voulons un salaire de base de 50 000 gourdes, la carte de débit doit passer de 10 000 à 25 000 gourdes. Nous voulons aussi de meilleures conditions de travail. Ces exigences ne sont pas négociables », ont indiqué les membres de Fantom 509, qui, après plusieurs mouvements de protestation, ont eu gain de cause comme la libération et la réintégration de plusieurs policiers sanctionnés. Ils avaient aussi déjà poussé le gouvernement à doubler leur carte de débit qui était de 5 000 gourdes. Cette situation de tension et de panique dans la capitale se déroulait sous les regards passifs d’autres policiers, de service… Le Nouvelliste a tenté en vain d’entrer en contact vendredi soir avec les autorités policières pour un premier bilan officiel de cette journée de tension. Une source proche du parquet de Port-au-Prince, contactée par Le Nouvelliste, s’est gardée de se prononcer publiquement sur les agissements de Fantom 509. « C’est un dossier très sensible, je ne souhaite pas en parler pour le moment », a-t-elle dit.   Environ 72 heures après sa nomination comme directeur général a.i.de la Police nationale d'Haïti, Léon Charles a subi son premier test, un baptême de feu bien enflammé.   Dans sa première prise de parole le 17 novembre dernier à l’Académie de police, le nouveau chef de la PNH avait admis, sans citer le mot syndicat, que les policiers peuvent se regrouper selon les règles. « Vous avez ce droit, mais vous avez aussi le devoir d’appliquer la loi même si vous devez le faire contre votre collègue policier qui sème le trouble. Mwen pap aksepte sa, nou te pran angajman pou n pwoteje, nou paka ap detwi », avait-il déclaré. Selon Léon Charles, le métier de policier est très noble. « Le policier doit se sentir fier de protéger la population. Pour protéger, il y a un sacrifice à faire. Vous avez choisi d’être policier pour contribuer à protéger la population. An n retounen nan baz, an n analize angagman nou te pran lè nou te fèk antre nan lapolis la », demandait-il. Léon Charles avait  promis de travailler à améliorer les conditions de fonctionnement des policiers. « Une mission, des hommes et des moyens. La mission est claire : assurer la sécurité du pays. Les hommes sont présents, vous avez pris l’engagement de protéger la population. Les moyens ne sont pas généralement toujours disponibles. Il me revient de faire en sorte que le minimum des moyens nécessaires soit mis à votre disposition », avançait le patron de la PNH. L’ancien représentant d’Haïti à l’OEA a dit constater que la PNH fait face à un mouvement de revendications de certains policiers « qui, quoique légitime, peut aussi, à travers certains de ses modes d’expression, anéantir les deux piliers sacro-saints, à savoir la discipline policière et la confiance de la population. » Aux policiers et policières, le chef de la PNH leur demandait de conjuguer leurs efforts « afin de permettre à nos différends ou à nos revendications d’évoluer vers un dépassement plutôt que vers une confrontation pouvant causer l’effondrement même de l’institution… » Léon Charles avait appelé les policiers à respecter leur engagement qui consiste à protéger et servir la population. Le respect des droits humains sera l’une de ses priorités, avait-il ajouté, exhortant les policiers à ne pas avoir un comportement répréhensible quand ils sont eux aussi victimes de l’insécurité. Après cette journée de tension orchestrée par le groupe Fantom 509, d'importants changements ont été opérés sein du haut état-major de la Police nationale. Frantz Jean François devient le nouvel inspecteur général en chef, il remplace Hervé Julien. Joseph Jean Mary Wagnac est nommé à la direction centrale de l’administration et des services généraux de la PNH, selon des sources policières.